25 octobre 2008 6 25 /10 /octobre /2008 10:00


Messe de Requiem pour Jean Ferré
Saint Eugène, 25 octobre 2008
Homélie donnée par le Père Éric IBORRA



Chers amis, vous le savez tous, le 10 octobre 2006 s'éteignait celui dont la mémoire nous réunit aujourd'hui en cette église, Jean Ferré. Pour lui rendre hommage, et pour le confier à la miséricorde de Dieu en offrant à son intention le saint Sacrifice de la Messe.

Pour moi, comme j'ai eu l'occasion de le dire ici-même l'an dernier, il avait été ce chroniqueur de radio et de télévision dont je lisais avec plaisir les billets pleins de saveur lorsque j'étais étudiant, à l'époque de sa collaboration au Figaro-Magazine. Puis j'ai découvert le rôle fondamental qu'il a joué dans la création et l'animation de Radio Courtoisie, cette radio à laquelle vous êtes tous attachés et que je ne connaissais alors que par ouï-dire. J'ai eu depuis l'occasion de mieux la connaître puisque j'ai été invité plusieurs fois au cours de l'année écoulée à m'exprimer sur ses ondes. Et j'ai été frappé à la fois par l'esprit convivial qui y règne et par la précarité des locaux.

Convivialité et précarité qui sont en même temps le signe et la rançon de la liberté, de cette liberté à laquelle Jean Ferré a toujours été passionnément attaché. Vivre libre, en ce monde marqué par le péché, c'est se refuser aux compromissions, c'est affronter les puissants du moment, c'est accepter aussi de renoncer parfois à sa liberté extérieure pour préserver sa liberté intérieure. Tout cela Jean Ferré l'a vécu, vous le savez mieux que moi, et certains d'entre vous l'ont même accompagné de près sur ce chemin qui n'était pas sans risques.

Ce combat pour la liberté, Jean Ferré l'a mené essentiellement en tant que journaliste. Permettez-moi de citer un article glané sur le web, pardon sur la toile – francophonie oblige –, qui rappelle ses prises de position. « Jean Ferré a toujours revendiqué son opposition à ce qu'il appelait la pensée unique et à l'idéologie politiquement correcte. Se situant lui-même dans la lignée de Charles Maurras – Charles Maurras dont je signale qu'une messe sera dite pour le repos de son âme le 14 novembre prochain à 19 h en notre église –, Jean Ferré était favorable à la royauté et prônait un catholicisme traditionnel. Il a toujours exprimé sa volonté de défendre la langue et la civilisation françaises. Résolument à droite, il s'est lui-même présenté comme anti-communiste. Dans cette optique, Radio Courtoisie a été conçue par lui comme un moyen de faire avancer ses idées. Comme il l'affirmait lui-même sur les ondes, il souhaitait rassembler tous les patriotes et réconcilier tous les Français. Il se définissait lui-même volontiers comme un humaniste. Il condamna ainsi vigoureusement la violence meurtrière de tous les totalitarismes, celle d'Hitler et du national-socialisme, mais aussi celle de Staline et du communisme. Défendant une conception chrétienne du droit à la vie, il était opposé aussi bien à la peine de mort qu'à l'interruption volontaire de grossesse. A plusieurs reprises, il a invité sur les ondes le professeur Jérôme Lejeune et les représentants de sa fondation ».

Ce combat pour la liberté, Jean Ferré l'avait aussi jalonné de livres. Il s'était notamment intéressé à la peinture et en particulier à celle de Watteau, ce représentant de l'élégant dix-huitième siècle français. Celui qui écrivit une « Lettre ouverte à un amateur d'art pour lui vendre la mèche » aurait certainement apprécié l'analyse que le pape Benoît XVI a faite à mots couverts de « l'Art contemporain » lors de son discours mémorable au monde de la culture dans le cadre prestigieux du Collège des Bernardins, et qui critiquait en filigrane le mercantilisme qui le caractérise. Car les propos du Pape sur la musique sont aisément transposables au domaine de la peinture et des arts plastiques. Benoît XVI disait ceci : « De cette exigence capitale de parler avec Dieu (qui caractérisait le monde monastique) est née la grande musique occidentale. Ce n'était pas l'œuvre d'une « créativité » personnelle où l'individu, prenant comme critère essentiel la représentation de son propre moi, s'érige un monument à lui-même. Il s'agissait plutôt de reconnaître attentivement, avec les « oreilles du cœur  », les lois constitutives de l'harmonie musicale de la création, les formes essentielles de la musique émise par le Créateur dans le monde et en l'homme, et d'inventer une musique digne de Dieu qui soit, en même temps, authentiquement digne de l'homme et qui proclame hautement cette dignité ».

L'authentique humanisme exige par conséquent un décentrement de soi qui permet en outre de retrouver la solidarité essentielle qui lie l'homme au cosmos, brisant ainsi l'enfermement mortifère sur le moi, maladie typique de la modernité. La redécouverte de cette solidarité avec le cosmos peut conduire à voir en celui-ci une épiphanie de son Auteur, une manifestation de son Créateur. Et prolonger le dialogue de l'âme avec les choses et les gens jusqu'en ce lieu mystérieux où il atteint la Cause suprême de tout être, Dieu lui-même. Un tel humanisme se fait alors spirituel. Et selon la parole de l'Apôtre, les ennemis contre lesquels il faut alors lutter ne sont plus seulement des êtres de chair et de sang mais les esprits maléfiques qui rôdent dans les airs et qui les inspirent. Le combat pour la liberté et pour la vérité devient alors un combat spirituel, un combat apocalyptique même, en ce sens qu'il dévoile les causes profonde des maux que nous traversons.

Je suppose que Jean Ferré a été conscient de cela, de la dimension théologale inhérente au combat politique. Alors ce combat pour la liberté devient aussi combat pour la sainteté, combat pour soi-même se libérer de ces multiples idoles qui nous leurrent, pour reprendre encore une expression de Benoît XVI, cette fois-ci sur l'esplanade des Invalides. Nous abordons là le « secret du Roi », l'intimité de la relation qui unissait Jean Ferré à son Dieu, ce domaine où il ne nous est pas permis de pénétrer. Ce combat, Notre Seigneur l'a remporté sur la croix et il associe tous ceux qui le veulent bien à sa victoire. Il le fait au moyen de sa grâce et au moyen de son Eglise.

Confions donc Jean au secours des anges, à l'intercession des saints, à la prière de ceux qui l'ont, sur terre, connu et aimé. Que la puissance du sacrifice du Christ achève de le libérer, que le repos éternel lui soit accordé, que la lumière de gloire brille pour toujours sur son visage. Ainsi soit-il.




Quelques photos de la messe













Les photos suivantes sont on été réalisées par un membre du Forum du Pays Réel et de la Courtoisie













catégorie : » Généralités
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